Arles : Alberto Lamelas, 3 oreilles d’une très bonne corrida de Yonnet !

Alberto Lamelas et les toros de Yonnet ont donné une fin de temporada arlésienne en apothéose. L’espagnol a coupé trois oreilles d’une très intéressante corrida de Yonnet, encastée, de présentation impeccable et aux larges possibilités de triomphe. Le duo Lamelas/Yonnet ont offert une fin de Féria du Riz 2023 parfaite.

Les toros des héritiers d’Hubert Yonnet sont sortis de présentation parfaite, digne d’une corrida de toros de première catégorie. Les 3 premiers toros portaient le fer de Christophe Yonnet, les 3 suivant de Hubert. Ceux du fer de Christophe plus manibles et mobiles, ceux du fer d’Hubert plus âpres et difficiles mais supérieurs au cheval, notamment les 5° et 6°

Tous ont offert des possibilités de triomphes à des toreros qui auraient dû quitter tous ensemble les arènes a hombros. Seul Alberto Lamelas est parvenu à pleinement exploiter les qualités de ses deux adversaires, très différents l’un de l’autre, donnant deux faenas opposées. Sa première prestation plus torera et agréable esthétiquement. La seconde valeureuse et d’un fort intérêt pour les plus “toristas” et amateurs de toros. Le travail réalisé par Lamelas fut justement récompensé par une sortie a hombros méritée.

Rafaelillo n’a pas laissé un grand souvenir dans l’amphithéâtre arlésien. Dans la lignée de ses prestations de Mont de Marsan et Dax, c’est le strict minimum que s’efforça de proposer le maestro de Murcia. Dommage car son lot pouvait lui permettre une meilleure sortie.

Alvaro de la Calle revenait dans les arènes d’Arles après son succès de la dernière temporada. Malheureusement, son manque de pratique se fut nettement sentir tout au long de la tarde malgré un engagement sans faille. La volonté ne fait malheureusement pas tout, notamment lorsque son lot fut très favorable. Sa première prestation laissa un bon sentiment avec une faena dans un sitio toujours sur le terrain de l’animal. C’est ce qu’on retiendra de la tarde de l’habituel “sobresaliente”.

Toro a toro

Le premier exemplaire porte le fer de Christophe Yonnet est d’une présentation excellente. Le toro est un joli castaño de trapio imposant et armé. Il pousse légèrement sur deux rencontres équestres en mettant les reins. Le toro est sérieux et menaçant. Rafaelillo réalise une faena professionnelle mais ne fait pas le nécessaire pour extraire le maximum du toro. Il privilégie desplante d’usage plutôt que l’enchaînement de muletazos, pourtant notables par moment. Il torée uniquement le piton droit sans donner un seul muletazo main gauche. Après deux échecs successifs aux aciers, il prend le descabello avec un toro qui a la tête haute. Il échoue logiquement à plusieurs reprises avant d’en finir. Division d’opinions.

Le second du fer de Christophe Yonnet est plus fin de ligne, armé et sérieux. Réception accrochée de Alvaro de la Calle avant un tercio de piques inégal. 3 piques pour 2 rencontres au cheval et un toro qui pousse malgré un manque de force apparent. L’espagnol réalise une faena d’un grand engagement malgré une imperfection notable. De la Calle se croise et s’expose devant un toro qui se livre peu à peu. Il parvient à tirer de bonnes séries qui ont de l’écho sur les tendidos. Malheureusement il pinche à plusieurs reprises avant un 3/4 de lame bas qui est d’effet immédiat. Dommage

Alberto Lamelas reçoit parfaitement le troisième de Christophe Yonnet d’une présentation excellente. Le toro met la tête dans ses charges avant deux piques notables où le toro pousse. Quite par gaoneras très courageux de Lamelas face à un toro qui serre. Ovation générale. Très bon tercio de banderilles de Mathieu Guillon et troisième de la cuadrilla, qui sont applaudis à leur tour. Alberto Lamelas débute au centre du ruedo par derechazos templés. L’espagnol prend d’emblée la mesure du bon exemplaire de Yonnet qui charge avec race. Le début de faena est intense et porte sur les tendidos. Lamelas laisse ensuite de belles naturelles à allure lente. Il porte une épée engagée où il passe tout près de l’accrochage. Cela lui permet de couper 2 oreilles. Grande ovation pour le toro qui aurait pu être primé d’une vuelta posthume.

Le quatrième est plus commode de présentation. Rafaelillo conduit le toro pour deux rencontres équestres où le toro pousse. Rafaelillo réalise une faena discrète face à un toro, lui aussi discret. Le résultat est sans grande transmission pour une actuation manquante d’intérêt. En insistant un peu plus, peut-être aurait-on vu des qualités chez ce toro ? Un 3/4 de lame efficace.

Le cinquième Yonnet est commode de présentation, correct de trapio et aux armures inférieures aux trois premiers. 2 piques avec un toro qui pousse sérieusement mais qui met beaucoup de temps à partir. La cuadrilla de Alvaro de la Calle mène une lidia catastrophique avec de nombreux coups de cape inutiles. La faena manque d’intérêt faute à un toro qui paye la mauvaise lidia et un torero juste techniquement. C’est dommage car le toro avait des qualités indéniables.

Le dernier Yonnet du fer de Hubert est bien présenté. Alberto Lamelas le lidie vers le centre avec précision avant un tercio de piques vibrant. 3 rencontres avec 2 réelles piques où le toro s’implique, notamment lors de la première rencontre où il renverse la cavalerie. Salut de Victor del Pozo aux banderilles. Alberto Lamelas réalise une faena où il est allé puiser les qualités du toro à la source. L’animal est sur la réserve avec des charges plutôt courtes. On note un fond de caste chez l’animal qui n’est pas évident. Sur le piton droit, Lamelas laisse le toro récupérer dès l’entame. À gauche, Lamelas s’emploie pour allonger la charge de l’animal et y parvient sur quelques reprises. L’intensité de ce dernier tiers va à mas avec un public qui reconnait les efforts du torero. Une entière un peu basse fait rapidement effet pour libérer une oreille dans l’ensemble méritée.

Arles, Dimanche 10 septembre 2023

6 toros de Christophe Yonnet (1/2/3) / Hubert Yonnet (4/5/6) pour
Rafaelillo : division et silence
Alvaro de la Calle : salut et salut
Alberto Lamelas : 2 oreilles et une oreille

Jean Dos Santos